180 habitants éparpillés sur les 1250 ha de forêts et de prairies. Coincée au fond de la vallée de la Dore sur le premier plateau formé par la jonction des monts du Livradois et du Forez, la commune de Mayres n’est ni un lieu où on passe, ni un lieu où on va. Le bourg, où il reste la mairie et l’église, ne dépasse pas la cinquantaine d’habitants … une opération de 20 logements en ville. Il faut bien imaginer que la montée en puissance des communautés de communes, l’apparition du Pays ou la recomposition annoncée des limites communales ne devraient pas laisser bien longtemps la commune de Mayres et ses habitants, seuls à leur triste sort. Pour autant, les quelques habitants et élus, jeunes, travaillant sur place comme agriculteurs, charpentiers ne s’apitoient pas sur leur condition rurale et sont bien décidés à continuer de faire vivre leur commune. Depuis plusieurs années, diverses actions ont permis de redonner un peu de vie au bourg qui était devenu un amas de vielles maisons vides et insalubres : rachats et démolition pour ouvrir la place de l’église, réhabilitations en logements sociaux et aménagement des espaces publics.Dans ces conditions la réalisation d’un nouvel équipement public, symbole de la vie collective d’un village, apparaît comme une gageure. Comment rassembler dans des lieux vides ? Le dernier projet en date est l’aménagement de quelques parcelles pour maisons individuelles, accrochées sur la partie basse du bourg et ouvertes sur la vallée. Entre ces terrains et la place, le bâtiment est une ancienne grange en pierre qui a été occupée pendant longtemps par un restaurant tenu par une vielle dame mais aujourd’hui fermé.
Vu l’emplacement stratégique pour le bourg, la mairie décide donc de racheter l’édifice pour en faire un équipement culturel et festif. La ferme existante étagée sur deux niveaux, n’est pas vraiment en bon état : les murs en pierre sont sains mais la toiture est à refaire, les encadrements de fenêtres en bois sont tous à reprendre, etc. La commune est petite, le budget aussi : 345 000 euros HT pour réparer et aménager 340 m2 d’une salle de fêtes qui recevra 250 personnes et toutes les normes qui en découlent.
Le projet est le témoin de ce besoin de frugalité : garder ce qui existe, faire peu de choses mais bien les faire.
D’abord, ce sont les habitants qui vont aider. Atour d’un chantier participatif et quelques week-end, une équipe de bénévoles va réaliser les démolitions, décaisser à la main le sol de l’étage bas, les anciennes écuries pour y aménager une petite salle pour les associations et le local chasseur. Ensuite, l’étage haut, ouvert sur la place de la mairie et de l’église, sera occupé par la grande salle des fêtes. La commune souhaitant maintenir la capacité d’accueil de l’ancien restaurant tout en lui adjoignant des fonctions techniques essentielles.
Le projet fait le choix de garder le volume de l’ancienne salle, de conserver le vieux parquet en pin, les fermes en sapins et quelques uns des murs en schiste caractéristiques du Livradois. Ensuite, l’installation du meuble bar et le percement de deux ouvertures, hors échelle, cadrées sur le paysage de la vallée seront les seuls efforts permettant de donner le caractère très domestique d’un grand salon en opposition avec les habituelles et froides salles des fêtes de campagne.
En conséquence, les fonctions servantes seront organisées dans une extension qui viendra s’accoler à la façade Ouest sur le village et deviendra le Landmark au fond de la place, l’entrée symbolique du nouvel équipement. Dans un tissu vernaculaire à la géométrie incertaine, cette nouvelle épaisseur transparente, fait face sur le coté sud aux très proches constructions voisines et au travers du petit jardin aménagé entre eux, un peu engoncé, projette, à l’intérieur de la salle ou dans les espaces de transition, les pignons aveugles en pierres de l’extérieur.
Cette extension est pensée comme un assemblage de pièces de bois, un peu complexe, un peu précieux, comme un beau jouet au fond de la place. Les pliages en zinc, noirs comme les schistes des murs, rythment la façade et renforcent le sentiment d’un objet à part dans le paysage du bourg. La charpente est une série de poutres en lamellé-collé, dont le profil singulier en V, permet de récupérer les eaux de pluies au tiers de la toiture et laisser un débord de toit libre de chéneaux afin de mettre en valeur les têtes de poutres serrées. La petite coquetterie des doubles poutres au dessus des refends de façade permet de couper la façade en trois : deux cadres massifs en mélèze aux deux extrémités pour la cuisine et les vestiaires. Au centre, le vide abrité de l’entrée est marqué par l’assemblage des poteaux et seuils en bois et l’apparition en sous-face des poutres de la toiture.